Créativité informelle pour renforcer la communauté locale

Créativité informelle pour renforcer la communauté locale

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Un village avec une histoire de moulins à eau

Il y a quelques années, un moulin à eau miniature est apparu sur le Ruau, un ruisseau qui traverse le village de Saint-Blaise. Bien que le niveau d’eau soit parfois tombé si bas que la roue ne tournait plus, elle est restée en place pendant près de deux ans. Les moulins à eau sont un élément clé de l’histoire du village, ayant alimenté un certain nombre d’artisanats disséminés le long du ruisseau. Il ne reste aujourd’hui qu’un moulin pleine grandeur, pour les touristes. Pour célébrer les mille ans du village, l’architecte Mario Botta a conçu une triple roue à eau au bord du lac (photo ci-dessous).

Un atelier créatif pour fabriquer des moulins à eau

Cette année, Pascal Winkler – c’est lui qui avait construit le moulin miniature – a proposé un atelier d’une semaine à ses fils et aux enfants du quartier pour construire des moulins à eau. L’atelier s’est déroulé sur le toit plat de l’Atelier du Ruau sous une bâche improvisée, surplombant le ruisseau. Le dernier jour, les productions variées ont été installées le long d’un tronçon du ruisseau pour que tout le monde puisse les admirer. (Voir la galerie en bas de page)

Enrichir la communauté locale

Cette créativité qui s’épanouit en dehors des structures formelles fait partie des contributions les plus riches à la vie locale. Pourquoi? Parce qu’elle enrichit la communauté locale de manière libre dans tous les sens du terme. Par sa gratuité, elle dépasse la logique des administrations et des acteurs commerciaux. Elle contribue à la cohésion de la communauté, offre un sujet de discussion, nourrit à la fois un sentiment d’identité et de fierté locale et un sentiment d’appartenance à un lieu qui a ses propres richesses. Par un intérêt partagé, elle permet de surmonter l’isolement croissant des individus.

Un défi pour la gouvernance locale

Or, cette forme d’activité est la plus difficile à encourager pour ceux qui travaillent au sein des institutions et des administrations. Certains diront que ce n’est pas leur travail. Les débats sur la fusion ont bien montré que la gouvernance locale est considérée comme une activité essentiellement administrative. On y travaille avec des lois, des décrets, des lignes budgétaires, des subventions et des relations contractuelles. On est souvent limité par l’inertie de méthodes de travail bien établies, des considérations budgétaires, des intérêts particuliers et la politique des partis. En conséquence, les acteurs ont peu de temps pour les aspects les plus créatifs et imprévisibles de la vie locale. Encourager une communauté locale diversifiée et riche en contacts humains ne correspond pas à leur mission. On peut se demander si une telle vision uniquement administrative du rôle des collectivités locales est adéquate.

Activités informelles pour construire la communauté

S’enthousiasmer pour la construction des moulins à eau de taille miniature et qui ne servent aucune fonction peut sembler frivole. Mais la survie et le développement futur dépendent de la cohésion et de la force des liens tissés au sein de la communauté locale. Ce n’est qu’à travers un tissu solide d’interactions humaines que les défis majeurs d’une population vieillissante, d’une jeunesse désoeuvrée, d’exclusion et d’incivilités, d’une mauvaise santé et d’une démocratie défaillante seront surmontés. Ces activités informelles d’individus ou de groupes contribuent autant, sinon plus, à consolider le tissu de la vie locale que le faste des cérémonies officielles.

Célébrer la créativité informelle sur le plan local

Alors, que peut-on faire? D’abord, célébrer le travail créatif au sein de la communauté, mais pas de manière à le récupérer ou le contrôler. Une grande partie de sa richesse réside dans le fait d’être informel. Chercher à le reprendre sous la houlette d’une institution ou d’une administration risquerait d’éteindre ce qu’il a de plus riche: sa liberté, sa fraîcheur, son imprévisibilité, tous ancrés dans son parcours hors des institutions. En célébrant cette créativité, on la fait mieux connaître au sein de la communauté. Deuxièmement, ceux qui sont dans des structures plus formelles devraient se demander comment ils peuvent aider de telles initiatives sans nuire à leur nature informelle. C’est une question délicate car elle les oblige à sortir de leur logique habituelle. Une voie serait de fournir des canaux de communication informels, comme des panneaux d’affichage réservés aux activités locales (si nécessaire sous la protection d’une voisine (*) ou d’un commerce avoisinant). Une autre possibilité serait de faciliter l’accès à un savoir-faire qui manquerait (écriture, tournage vidéo, enregistrement sonore, écoute active, relation d’aide, création de sites internet, gestion de projets,…). Une fois la population et l’administration sensibilisées au besoin de cette créativité informelle, d’autres possibilités vont surgir. La créativité a l’avantage de nourrir la créativité.

(*) Bien entendu, cela peut être un voisin aussi….

Une galerie de roues à eau

Cliquer sur n’importe quelle photo pour accéder à la galerie.

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